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Le pourquoi du succès des cultures génétiquement modifiées

L’agriculture est complexe. Chaque jour, les agriculteurs doivent prendre des centaines de décisions concernant leurs activités à la ferme en se basant sur un ensemble de variables en constante évolution, telles que la météo et les ravageurs. De ces décisions dépend la réussite de leurs cultures, dont les produits se retrouveront sur le marché à l’intention des consommateurs. Je sais qu’il peut être tentant de simplifier l’agriculture afin d’en faire un bon sujet d’article de presse, mais cela desservirait grandement tant le monde agricole que les consommateurs qui s’efforcent de comprendre comment sont produits leurs aliments.

Un récent article du New York Times remet en question l’utilité de certains types de cultures génétiquement modifiées, à cause de l’incidence sur les rendements et de l’utilisation des pesticides. Il s’agit toutefois d’une évaluation très simpliste de la réussite ou non de ces cultures.

L’une des mesures les plus évidentes du succès des cultures en question – mesure omise dans l’article –, c’est que lorsqu’on a donné aux producteurs la possibilité d’utiliser les cultures tolérantes aux herbicides ou résistantes aux insectes ravageurs, ils les ont largement adoptées. En fait, ces cultures modifiées constituent les technologies agricoles les plus rapidement adoptées de l’histoire. Au Canada, plus de 90 % du maïs, du soya et du canola cultivés sont des variétés tolérantes aux herbicides ou résistantes aux insectes. Pourquoi? Parce que les agriculteurs ont constaté leurs avantages. S’ils ont fait le choix de semer ces cultures, c’est qu’elles sont la meilleure option pour leurs fermes.

Aucune technologie agricole ne constitue la panacée, mais plus le choix d’outils qui s’offrent aux producteurs est vaste, mieux c’est. Les agriculteurs sont des gens d’affaires intelligents qui décident des technologies à employer dans leur ferme, et si ceux du Canada ont majoritairement choisi d’adopter les cultures tolérantes aux herbicides ou résistantes aux insectes, c’est qu’elles leur permettent de produire plus sur moins de terres.

Pour ce qui est des informations présentées dans l’article du New York Times à propos du lien entre ces types particuliers de cultures transgéniques et le recours aux pesticides, elles sont, au mieux, trompeuses (par exemple, un graphique compare deux unités de mesure distinctes). Mais plutôt que de débattre d’ensembles de données différents, il importe que nous aidions les gens peu familiers avec les complexités de l’agriculture à comprendre l’utilité de ces cultures pour les producteurs.

Un élément clé de cette adoption rapide est que parmi les plus importants défis des producteurs agricoles, il y a les insectes ravageurs, les mauvaises herbes et les maladies qui menacent de détruire leurs cultures. Depuis que l’agriculture existe, les agriculteurs ont dû trouver des moyens de lutter contre les ravageurs, qui causent des pertes de rendement. Les outils agricoles modernes, comme les cultures tolérantes aux herbicides ou résistantes aux insectes ainsi que les herbicides, les aident à lutter contre les ravageurs plus efficacement et plus durablement.

Les cultures tolérantes aux herbicides constituent l’une des innovations majeures ayant aidé les agriculteurs à adopter des pratiques de travail réduit du sol. Elles ont instauré une ère nouvelle en matière de désherbage et permis d’éliminer les mauvaises herbes avec moins d’intrants, plutôt que de recourir à la vieille méthode du labourage, plus nuisible au sol. En travaillant moins le sol, les producteurs sont en mesure d’en améliorer la santé, tout en réduisant le nombre de passages de tracteurs dans leurs champs, ce qui permet d’économiser d’énormes quantités de diésel et de diminuer les émissions de gaz à effet de serre d’environ 30 millions de tonnes par an.

Lorsque les discussions à propos de certaines cultures génétiquement modifiées portent sur le fait qu’elles ont conduit à une utilisation accrue ou réduite des pesticides, on est complètement à côté de la cible. Ce qu’on devrait plutôt regarder, c’est comment ces cultures ont contribué à créer un système agricole plus durable, qui a aidé les agriculteurs à produire plus par unité de surface qu’à aucun autre moment de l’histoire. Il s’agit là d’une composante importante de la réussite que constitue l’agriculture moderne. La population mondiale continue de croître, et les producteurs agricoles doivent produire plus d’aliments, tout en protégeant les habitats naturels. Selon une récente étude que CropLife Canada a commandée à l’entreprise RIAS, sans les pesticides et certains types de cultures biotechs, il nous faudrait 50 % plus de terres au Canada pour produire autant qu’aujourd’hui. Il s’agit là de superficies importantes, sous forme de forêts, de prairies naturelles et de milieux humides, qu’on peut laisser intactes plutôt que de les exploiter à des fins agricoles. Afin de protéger la biodiversité, il sera impératif de continuer à faire croître la productivité sur les terres actuellement en exploitation.

Et contrairement à ce qu’on dit dans le New York Times, ces cultures ont contribué, selon l’étude de RIAS, à générer une plus importante activité économique à la ferme et dans l’ensemble de la filière économique, à soutenir des pratiques agricoles plus durables sur le plan environnemental et à aider à ce que les prix des aliments restent abordables pour les Canadiens.

L’accès aux innovations de la sélection végétale a donné aux agriculteurs canadiens un avantage considérable par rapport à leurs homologues européens. En Europe, pour des raisons politiques, les agriculteurs ne peuvent pas cultiver de variétés dérivées du génie génétique. Les gains de productivité enregistrés au Canada, rendus possibles entre autres par le recours aux cultures tolérantes aux herbicides et résistantes aux insectes ainsi que par l’emploi des pesticides, sont l’une des raisons pour lesquelles notre pays est un exportateur net de produits alimentaires, qui expédie des denrées partout dans le monde, alors que l’Europe demeure une importatrice nette d’aliments. En outre, l’accès aux technologies agricoles modernes au Canada explique en partie pourquoi les coûts alimentaires dans notre pays sont parmi les plus bas au monde, tandis que les prix des aliments en Europe sont en augmentation.

Depuis des milliers d’années, les hommes travaillent à l’amélioration des cultures. Cela a permis l’obtention de plantes plus productives, plus robustes et en meilleure santé. De nos jours, les scientifiques continuent d’améliorer les cultures grâce à une panoplie d’outils – le génie génétique n’étant que l’un d’eux. Il en est résulté plus que des cultures tolérantes aux herbicides et résistantes aux insectes, car les agriculteurs ont aussi accès à des cultures tolérantes à la sècheresse et résistantes aux maladies.

Et le futur des innovations en sélection végétale s’annonce prometteur : citons entre autres la possibilité de produire des cultures aux qualités nutritives améliorées et d’autres contenant moins d’allergènes. L’accès à des variétés de cultures nouvelles et améliorées, mises au point par diverses méthodes, contribuera de façon importante à ce que les agriculteurs puissent continuer à nourrir la planète dans l’avenir.

Comme le souligne l’article du New York Times, la question de la sécurité des cultures transgéniques est maintenant réglée. Dans le monde entier, il fait consensus dans la communauté scientifique qu’elles sont sans danger. Cela étant, pourquoi ne pas laisser aux agriculteurs le soin de déterminer quelles cultures ils désirent cultiver dans leurs fermes? Après tout, qui est mieux placé qu’eux pour faire ce choix?

Il y a eu d’excellentes réponses à l’article du New York Times; en voici quelques-unes (en anglais seulement) :

Why Danny Hakim’s New York Times GMO exposé misleads, par Graham Brookes

New York Times on GMOs, par Jayson Lusk

Rehashing a Tired Argument, par Kevin Folta

The tiresome discussion of initial GMO expectations, par Andrew Kniss


Ted Menzies,
Président, CropLife Canada

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