Comment l’innovation agricole peut aider à protéger la biodiversité
Un nouveau rapport publié par la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques, des Nations unies, a récemment fait l’objet d’une grande attention, comme il se doit. Selon ce rapport, nous perdons de la biodiversité dans le monde à un rythme alarmant. C’est un problème auquel nous devons nous attaquer collectivement – en tant que pays, industries et sociétés du monde entier.
Comme l’indique le rapport, de nombreux facteurs ont une incidence sur la diversité biologique, notamment les changements climatiques, les maladies, l’urbanisation, la déforestation, l’exploitation minière et l’agriculture. Par conséquent, il n’existe pas de solution unique à ce problème. Protéger la biodiversité de notre planète est dans notre intérêt à tous, et il faudra un engagement collectif qui mette à profit la science et l’innovation dans tous les secteurs de l’économie.
Il ne fait aucun doute que l’agriculture a un impact considérable sur la biodiversité. Mais en tant qu’industrie qui produit des aliments, ce qui est essentiel à l’existence humaine, il est important que nous trouvions des moyens de continuer à cultiver qui limitent les effets négatifs sur la biodiversité.
Et nous avons réalisé des progrès notables sur ce front. L’agriculture est devenue plus durable qu’elle ne l’a jamais été. Nous pouvons maintenant produire plus par hectare qu’à tout autre moment de l’histoire. En produisant davantage sur les terres existantes, nous pouvons laisser intacts les habitats fauniques.
Au Canada, nous avons adopté l’innovation agricole pour favoriser la durabilité. Les pesticides et les cultures biotechnologiques aident les agriculteurs à tirer le meilleur parti des terres déjà utilisées pour produire de la nourriture, ce qui leur permet de laisser intacts les habitats naturels et de préserver la biodiversité.
Sans ces outils, les agriculteurs auraient besoin de 50 % de plus de terres qu’aujourd’hui pour produire la même quantité de nourriture. Pour mettre cela en perspective, ça représente plus que la superficie totale couverte par le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et l’Île-du-Prince-Édouard combinés.
De plus, les innovations de la phytologie (science des plantes) aident les agriculteurs à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et leur consommation de carburant. Ces mêmes technologies les aident aussi à améliorer la qualité de leur sol et à le rendre moins vulnérable à l’érosion éolienne et hydrique.
Les agriculteurs canadiens ont été parmi les premiers à adopter les cultures biotechnologiques, il y a plus de deux décennies. Les cultures tolérantes aux herbicides ont permis le passage à grande échelle aux pratiques de travail réduit du sol. Ces cultures ont permis aux agriculteurs d’appliquer un herbicide directement sur une culture pour supprimer les mauvaises herbes, sans nuire à la culture. Cela limitait considérablement le besoin des agriculteurs de travailler ou labourer leurs champs pour les désherber.
Si vous demandez à n’importe quel agriculteur canadien ayant adopté les méthodes de travail réduit du sol, il vous dira comment cela l’a aidé à accroître la matière organique et à améliorer la santé de ses sols. Et comme une poignée de sol contient plus d’organismes vivants qu’il n’y a de personnes sur la planète, cela a un impact majeur sur la protection de la biodiversité.
Et non seulement ces outils ont aidé l’agriculture à être plus productive, mais l’industrie a également réalisé d’importants progrès technologiques au cours des 60 dernières années, en mettant au point des produits plus sûrs et plus ciblés que jamais. Considérez ceci : les pesticides qui arrivent aujourd’hui sur le marché utilisent 95 % moins de matière active par hectare qu’il y a 60 ans. Cela signifie que les agriculteurs peuvent appliquer des doses plus faibles de pesticides, tout en continuant de protéger leurs cultures des insectes, des mauvaises herbes et des maladies.
De plus, les pesticides d’aujourd’hui se dégradent beaucoup plus rapidement dans l’environnement que leurs prédécesseurs. Tout cela signifie que nous faisons un meilleur travail pour limiter les impacts inutiles de l’agriculture sur l’environnement, tout en fournissant à nos agriculteurs les outils dont ils ont besoin pour produire des cultures sûres, nutritives et abondantes.
Heureusement, le système de règlementation canadien des cultures biotechnologiques et des pesticides, qui est fondé sur la science, a créé un environnement dans lequel les agriculteurs pouvaient exploiter le potentiel de ces technologies pour améliorer leurs activités agricoles, tout en protégeant la santé et la sécurité des personnes.
Mais tous les gouvernements n’adoptent pas ce type d’approche scientifique pour règlementer les innovations dans le domaine de l’agriculture. En divers endroits du monde, des politiques agricoles mal conçues font obstacle à l’innovation et, par conséquent, favorisent des pratiques de production alimentaire non durables qui menacent la biodiversité mondiale.
L’Europe, dont les politiques limitent sévèrement l’accès des agriculteurs aux cultures biotechnologiques et aux pesticides qui ont été jugés sans danger par des pays du monde entier, en est un excellent exemple. Sans accès à ces outils, les agriculteurs européens ne peuvent tout simplement pas répondre aux demandes de la population européenne en matière d’alimentation humaine et animale.
L’Europe doit donc importer des denrées alimentaires d’ailleurs. Ce faisant, elle exporte son empreinte environnementale liée à la production alimentaire vers des pays comme le Brésil, qui convertit des forêts en terres agricoles pour répondre à la demande. La tendance surprenante de la déforestation dans diverses régions du monde a des conséquences dévastatrices pour la biodiversité.
La question de savoir comment nous pouvons protéger la biodiversité mondiale est incroyablement complexe et multiforme. Et l’agriculture fait sans aucun doute partie de l’équation – ou, à mon avis, de la solution. L’histoire a montré que l’industrie agricole s’est servie du pouvoir de l’innovation pour favoriser la durabilité, et nous sommes prêts à poursuivre dans cette voie.
Mais nous avons besoin que les gouvernements soient des facilitateurs, qu’ils créent des environnements politiques favorables à l’innovation, afin que les agriculteurs puissent continuer à cultiver des aliments sûrs et de haute qualité, tout en protégeant l’environnement. L’agriculture fera partie de la solution, si les gouvernements le lui permettent.
Pierre Petelle,
président et chef de la direction, CropLife Canada